
Le CD et le DVD, supports peu goûtés par les collectionneurs de microsillons, ont néanmoins permis d'exhumer des documents rarissimes qu'on croyait perdus à jamais.
Dès le 1er janvier 1970, par un effet de calendrier, des millions d’adultes réalisaient que les chansons qui avaient bercé leur enfance étaient introuvables sur disques (bien sûr, le back catalogue des idoles restait disponible : Beatles, Rolling Stones, Bob Dylan, et, en France, Hallyday, Brel, Brassens etc. mais le choix était limité). Les plus prévoyants (ou les plus malins) en avaient conservé des enregistrements… mais dans quel état ? La mini-cassette, qui existait depuis 1964, proposait une sonorité médiocre en raison de sa vitesse de rotation extrêmement basse (4,75 centimètres par seconde). Pour une qualité sonore appréciable, il fallait au moins du 9,5cm/s voire du 19cm/s, vitesse du magnétophone à bande, objet beaucoup plus cher que la mini-K7. De 1970 à 1982, quelques enregistrements rares passèrent de mains en mains, mais rien de significatif. Il fallut donc se résigner : certains disques rares, certaines émissions de radio ou de télé étaient perdus à jamais.
Non !
Le show business n’est pas constitué de philanthropes, loin de là ! Les collectionneurs d’enregistrements rares de musique populaire ne constituaient pas, a priori, un marché juteux. Quel intérêt, dès lors, d’aller fouiller dans des tonnes d’archives (souvent mal conservées) pour retrouver des documents dont la publication sur vinyln’aurait rapporté qu’une poignée de dollars ? En revanche, le CD, lui, s’avérait beaucoup plus rentable. C’est ainsi qu’à partir de son lancement en 1982, les « majors » et même les petits labels se lancèrent dans une vaste opération, non seulement de réédition de disques rares et épuisés, mais également dans la publication de documents jusqu’alors inédits. Et, dans la foulée, vu le succès de ces CD, la publication de documents audio se poursuivit en vidéo sur DVD.
Les collectionneurs eux-mêmes furent mis à contribution
Au début des années 2000 fut retrouvée dans une caisse de bandes magnétiques suintant l’humidité une interview inédite de Serge Gainsbourg datant de 1967. Certes il y eut un gros travail de restauration pour le rendre audible
Mais aujourd’hui le document est sauf. En ce qui concerne les Beatles, un cas différent se présenta. En 1982, à l'occasion des vingt ans des Beatles, lors de la réédition du single "Love me do" de 1962, EMI fut contraint d'utiliser un 45 tours d'époque en état "presque Mint" emprunté à un collectionneur. Il était impossible, en effet, de retrouver la bande magnétique originale qui, pourtant, aurait dû être conservée dans les archives de la maison de disque.
Et les clips ?
Le terme « video clip » est passé dans le langage commun au début des années 80. N’empêche que le concept existait depuis bien plus longtemps. On pourrait remonter au début du 20ème siècle avec les « phonoscènes » de 1905, procédé amélioré trois ans plus tard par le « phonocinématographe » (1908) : il s’agit tout simplement de… vidéo-clips, au même titre que les Scopitones des années 1960-1965. Et c’est justement en 1965 que les Beatles « inventèrent » le vidéo-clip… pour de simples raisons pratiques : leur succès était tel qu’ils devaient sans cesse interpréter les chansons de leurs nouveaux disques sur les plateaux de télé du monde entier. Pour éviter de traverser la planète pour une opération de promotion qui se résumait, somme toute, à trois minutes, ils eurent l’idée de filmer, une fois pour toutes, leurs nouvelles chansons et d’envoyer le même document à toutes les chaînes. Le vidéo-clip était VRAIMENT né ! Mais jusqu’à tout récemment, il était impensable de revoir ces documents diffusés une fois ou deux à la télé il y a un demi-siècle. Or, grâce au DVD, ces documents que l’on croyait avoir péri, ressurgissent progressivement. Quel régal, quelle surprise de revoir (en noir et blanc) les Rolling Stones chantant "We love you" quelques jours après leur sortie de prison en 1967. Et ce gros plan sur le visage de Brian Jones complètement camé ! Une image qui, curieusement, n’avait pas été censurée.
Daniel Lesueur pour suite101.fr
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